Une rétrospective de Garry Winogrand à Washington

Garry Winogrand (1928-1984), un des grands photographes de la rue new-yorkaise et des instantanés de la vie quotidienne américaine, est « le moins étudié et le moins compris » de la génération des Diane Arbus, Robert Frank ou Lee Friedlander, selon Leo Rubinfien, commissaire de l’exposition de la National Gallery of Art et lui-même photographe.

Pourtant, il laisse une oeuvre forte de dizaines de milliers de clichés, qu’explore cette rétrospective présentée du 2 mars au 8 juin à Washington.

La mort soudaine et précoce du photographe (il a succombé à l’âge de 56 ans à un cancer fulgurant diagnostiqué quelques semaines plus tôt) a laissé quelque 4.600 rouleaux de films développés mais pas tirés sur papier, et 2.500 pellicules jamais développées, soit quelque 250.000 clichés, ont expliqué les organisateurs devant la presse.

Si certains avaient déjà été exhumés pour une première rétrospective au MoMa de New York en 1988, leur tâche « monumentale » pour cette exposition a donc été de choisir parmi 22.000 planches-contacts d’images que le photographe lui-même n’avait, pour nombre d’entre elles, jamais vues.

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Un tiers des quelque 200 photographies exposées sont des clichés « posthumes », comme la moitié des quelque 400 publiées dans le catalogue qui accompagne l’exposition. Et une soixantaine sont montrées là pour la première fois.

Garry Winogrand est d’abord le photographe des rues de New York, une ville qu’il voit « comme un grand théâtre dont les pièces, comiques ou tragiques, spontanées ou bien préparées, sont en représentation permanente », selon Sarah Greenough qui dirige le département photo de la National Gallery of Art.

Il cherche avant tout à savoir « à quoi ressemblent les choses quand elles sont photographiées ».

Dans ses photos, Winogrand, grand admirateur d’Henri Cartier-Bresson et surtout du photographe de la Dépression Walker Evans, montre avec tendresse, ironie ou tristesse la foule de Coney Island, les passants qui se pressent dans les rues de New York ou les soirées mondaines au Metropolitan Opera. Il a photographié des nababs et des ménagères, des stars et des champions, des hippies, des hommes politiques, des soldats et des aéroports.

Photographe qui essayait de capter « l’esprit du peuple américain », dans ses hauts et ses bas, à travers le portrait d’anonymes, selon Leo Rubinfien, il a également suivi des meetings politiques avec John Kennedy, des manifestations contre la guerre du Vietnam et publié, parmi les cinq livres de photos imprimés de son vivant, des séries sur les animaux.

Au Texas et à Los Angeles, thèmes de ses derniers clichés, il montre les  cow-boys, les strip-teaseuses ou les aéroports.

Il avait pris des milliers de photos mais il tardait à les trier et à les tirer, préférant la prise de vues. C’est ainsi que, au moment de sa mort, il a laissé près de 250.000 images qu’il n’avait jamais vues.

« Cette exposition est un premier pas vers une analyse d’ensemble du travail inachevé de Winogrand », selon Leo Rubinfien. « Elle est aussi l’occasion de s’éloigner d’une présentation thématique au profit d’une approche plus libre, fidèle à l’esprit qui était au cœur de sa démarche, ce qui permet de renouveler le regard porté sur son œuvre, même de la part de ceux qui pensent le connaître », ajoute-t-il.

Déjà exposée à San Francisco, la rétrospective Winogrand sera à Paris, au Jeu de Paume, du 14 octobre 2014 au 8 février 2015 (elle sera d’abord, cet été, au Metropolitan Museum of Art, et après, à Madrid, à la Fundacion Mapfre, au printemps 2015).

Garry Winogrand, National Gallery of Art, Washington, du 2 mars au 8 juin 2014

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