Les photoreporters anglo-saxons disent souvent : « Lorsque tu vois un Français, c’est que tu es allé trop loin. » L’adage fait référence à une poignée de têtes brûlées dont la figure de proue s’appelle Patrick Chauvel . Sur son portrait le plus célèbre, on le voit jeune moustachu, le visage terreux, hagard, porté à bout de bras. Chauvel a 25 ans et vient de prendre un éclat d’obus alors qu’il photographiait une charge de l’armée cambodgienne, baïonnette au canon, contre les Khmers rouges.
En 1992, la photo fait la une de «Cent photos pour la liberté de la presse », le premier album publié par Reporters sans frontières . Trente ans plus tard, RSF consacre un opus à Patrick Chauvel. « S’il n’a en rien une gueule de statistiques, ironise Christophe Deloire, le secrétaire général de RSF, celles-ci n’en restent pas moins sidérantes : 72 ans, dont 50 de terrain et 34 conflits couverts. » Alors que bon nombre de ses compagnons de route nous ont quittés, lui est toujours là. Il ne pensait pas vivre si longtemps et encore moins devenir une référence.
Son histoire particulière avec Paris Match commence à l’été 1954. Le magazine a 5 ans, Patrick aussi. Il se tient avec sa sœur debout derrière les grilles du château où sont signés les accords de Genève. Leur grand-père diplomate est à l’intérieur avec Pierre Mendès France, mais dehors il ne se passe rien. Les photographes mitraillent les deux enfants qui finiront dans la presse. Patrick Chauvel est face à son destin. À 19 ans, il part couvrir la guerre du Vietnam et enchaîne les conflits pour l’agence Sipa puis Sygma.
Il écrit des livres à succès – «Rapporteur de guerre », «Sky» – et fait partie des reporters qui ont inspiré le cinéaste Oliver Stone pour son film « Salvador ». C’est là que Chauvel rencontre Don McCullin, qui a contribué à cet album RSF aux côtés d’autres grands, comme James Nachtwey et Sorj Chalandon.
En 2016-2017, il couvre la bataille de Mossoul en Irak avec son fils Antoine Chauvel, devenu lui aussi photographe. A bientôt 73 ans, le photographe français couvre actuellement la guerre en Ukraine, comme il l’a fait auparavant pour d’innombrables conflits armés partout sur la planète. Du Vietnam, en passant par l’Irlande, la guerre en Tchétchénie, jusqu’à la Syrie et l’Afghanistan, voici un aperçu du métier de photographe de guerre. Comme toujours, 30 % des bénéfices de ces albums seront reversés à l’association, afin qu’elle poursuive son combat pour la liberté de la presse.
L’ouvrage livre un beau condensé de l’œuvre de Chauvel en 14 guerres, du Vietnam à l’Afghanistan en passant par le Liban, l’Irak et la Syrie. Pour ses œuvres complètes, allez voir le fonds photographique Patrick Chauvel, constitué de 380 000 photos, au Mémorial de Caen. Le directeur du Mémorial, Stéphane Grimaldi, organise aussi des rencontres : l’occasion pour les visiteurs de découvrir une œuvre unique et un personnage qui ne l’est pas moins.
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