Les Rencontres d’Arles 2015

Ce sont des premières Rencontres très attendues, avec un nouveau directeur, Sam Stourdzé, ex-directeur du musée de l’Elysée à Lausanne, qui succède à François Hébel. Celui-ci a jeté l’éponge l’an dernier après 13 ans à la tête du grand festival arlésien de la photographie, qui avait réussi à attirer près de 100.000 visiteurs en 2013, avant une édition moins faste l’an dernier.

François Hébel était en conflit avec l’Etat et les collectivités sur l’avenir des terrains des ateliers SNCF, lieu devenu emblématique des Rencontres, qui ont été vendues à la fondation Luma et abriteront bientôt un centre d’art contemporain et les nouveaux locaux de l’Ecole nationale supérieure de la photographie.

La présidence aussi change de main, l’ex-ministre des Affaires étrangères Hubert Védrine remplaçant Jean-Noël Jeanneney. Arles 2015 est dédié à Lucien Clergue, photographe et Arlésien, à l’origine des Rencontres, décédé en novembre dernier à l’âge de 80 ans.

Martin Parr, "Banquet d'investiture du maire de Todmorden, district de Calderdale, Angleterre", série The Non-Conformists, 1975-1980. Avec l'aimable autorisation de Martin Parr/Magnum Photos - Kamel Mennour
Martin Parr, « Banquet d’investiture du maire de Todmorden, district de Calderdale, Angleterre », série The Non-Conformists, 1975-1980. Avec l’aimable autorisation de Martin Parr/Magnum Photos – Kamel Mennour © Rencontres Arles

Cette année encore, les Rencontres profitent de trois bâtiments des anciens ateliers de la SNCF, notamment la Grande Halle et les Forges. Mais elles se redéploient progressivement et inaugurent un nouveau lieu, le site des anciennes papeteries Etienne, dans le quartier de Trinquetaille, qui accueillera cette année une nuit de projections le jeudi 9.

Arles change de look : on était habitués depuis une douzaine d’années aux affiches de couleurs vives de Michel Bouvet, pleines d’animaux et de légumes, emblèmes du festival. Celle de 2014 réunissait les banane, carotte, coq, cerf, chat ou rhinocéros des années précédentes pour un adieu. Ils sont tous abandonnés au profit d’un nouveau concept, le « renversement », allusion à la camera obscura. L’affiche de 2015 est une photo à l’envers.

Les Rencontres d’Arles 2015 proposent deux expositions sur des monstres de la photographie, deux Américains. La première, sur Walker Evans (1903-1975), est axée sur son travail imprimé, en particulier sa production pour les magazines, qu’il utilise pour un commentaire critique de la société. Et une rétrospective de Stephen Shore (né en 1947) propose ses séries cultes « Uncommon Places » et « American Surfaces » et aussi des œuvres moins connues ou inédites.

Le mot d’ordre de cette 46e édition est « le décloisonnement ». Sam Stourdzé a voulu faire dialoguer la photographie avec d’autres disciplines. Neuf expositions sur les quelque 35 des Rencontres font ainsi des incursions dans l’architecture, la musique et le cinéma.

Par exemple, Matthieu Chédid rencontre Martin Parr, un habitué d’Arles, pour une exposition qui associe images et musique à l’église des Frères-Prêcheurs, et une exposition aborde l’histoire de la photographe à travers les pochettes de disques vinyle.

Paul Ronald, Anouck Aimée dans "8½" de Federico Fellini, avec l'aimable autorisation de Raul Ronald, Archivio Storico del Cinema, AFEPaul Ronald, Anouck Aimée dans « 8½ » de Federico Fellini, avec l’aimable autorisation de Raul Ronald, Archivio Storico del Cinema, AFE© Paul Ronald, Archivio Storico del Cinema, AFE / Rencontres Arles

Pour le cinéma, Paul Ronald dévoile des images surprenantes de « 81/2 ». Photographe de plateau sur le film de Federico Fellini, sorti en 1963, il avait chargé un second appareil de pellicules couleur et, plus de 50 ans plus tard, ses photos nous offrent un regard inédit sur cette œuvre mythique en noir et blanc.

Sandro Miller, lui, rend hommages aux maîtres de la photographie avec la complicité de John Malkovitch qui se met dans la peau des leurs sujets, devenant ainsi la « Migrant Mother » de Dorothea Lange ou le « Jean-Paul Gaulthier » de Pierre et Gilles.

Arles voyage au Japon avec huit photographes, en Terre de feu avec les images du prêtre-ethnologue Martin Gusinde (1886-1969) sur les derniers indigènes de l’extrême sud de l’Amérique, au Congo avec Alex Majoli et Paolo Pellegrin.

Parmi les nouveautés, Arles Books, un événement satellite consacré aux nouvelles pratiques éditoriales. Sur plus de 1000 m2, il accueille 75 éditeurs du monde entier, la semaine d’ouverture au Magasin électrique des Ateliers, et désignera un « Prix du livre 2015 ».

Et les Rencontres lancent l’Atelier des photographes, un outil pédagogique d’éducation au regard en ligne.

Mais Arles, c’est toujours le Prix découverte qui sélectionnera un nouveau talent parmi dix jeunes photographes et la semaine d’ouverture, du lundi 6 au samedi avec les soirées au théâtre Antique, des rencontres, des conférences, des débats, des lectures de portfolios.

Et Voies Off, le festival off, qui depuis 20 ans fait découvrir le travail de jeunes artistes lors de soirées de projection dans la cour de l’Archevêché pendant la semaine d’ouverture. Cette année, ils sont 60 sélectionnées parmi près de 1500 dossiers.

Arles 2015, les Rencontres de la photographie, jusqu’au 20 septembre

Valérie Oddos @valerieoddos Journaliste, responsable de la rubrique Expositions de Culturebox

Vous pourriez aimer aussi: